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Calais : une infirmière libérale condamnée pour travail dissimulé

En début d’année, une infirmière libérale de Calais a été condamnée pour travail dissimulé, après avoir fait appel à un confrère pour assurer le suivi des soins de ses patients. Cette décision de justice a suscité une vague d'incompréhension et de colère parmi les professionnels de santé, qui dénoncent un décalage entre la loi et la réalité du terrain.
La récente condamnation d'une infirmière libérale de Calais pour travail dissimulé a provoqué une onde de choc et une vive indignation au sein de la profession. Son "crime" ? Avoir régulièrement fait appel à un confrère pour assurer la continuité des soins auprès de ses patients. Une pratique courante, voire indispensable, selon de nombreux infirmiers à domicile du territoire, qui dénoncent un profond décalage entre la législation en vigueur et la réalité complexe de leur quotidien, comme le révèle une enquête de notre rédaction.

« Plus de 80 % des infirmières fonctionnent de cette manière » 

Sous couvert d'anonymat, une infirmière calaisienne met en lumière une situation alarmante : 

« Pour parler franchement, toutes les infirmières libérales de Calais ou presque pourraient subir les mêmes sanctions. Ce n’est pas un choix, mais une obligation, si l’on veut que la continuité des soins soit établie. »  

Cette affirmation choc révèle l'ampleur d'une pratique qui, bien que juridiquement répréhensible, apparaît comme une nécessité pour garantir la prise en charge des patients.

La continuité des soins : une équation impossible ?

Un infirmier titulaire ne peut physiquement pas assurer seul les soins de tous ses patients au quotidien. Il faudrait pour cela une disponibilité inhumaine, sept jours sur sept, 24 heures sur 24. Face à cette impossibilité matérielle, les professionnels du Calaisis, comme dans de nombreuses autres régions, recourent à des remplaçants pour assurer cette indispensable continuité des soins. 

La difficulté majeure réside dans le fait qu'ils n'ont souvent pas la capacité financière d'embaucher un infirmier en collaboration, une solution qui impliquerait des charges salariales importantes.

L'URSSAF pointée du doigt

C'est précisément ce recours régulier à des remplaçants qui pose problème aux yeux des services de l'URSSAF. Selon l'interprétation stricte de la loi, cette pratique est assimilée à du travail dissimulé et donc passible de sanctions judiciaires. La loi est claire sur ce point : 

« Un infirmier ne peut se faire remplacer que temporairement par un confrère avec ou sans installation professionnelle ».
 
Le caractère "temporaire" est ici la pierre d'achoppement, car la réalité du terrain impose souvent un recours plus fréquent et régulier à des remplaçants pour pallier la surcharge de travail.

« Les patients avant tout » 

À l'instar de l'infirmière condamnée, de nombreux professionnels du secteur estiment que la loi doit impérativement évoluer pour tenir compte de leurs contraintes quotidiennes.  
« Il faudrait faire appel à plusieurs remplaçantes, sans aucune récurrence dans les jours où celles-ci nous remplacent. Ce qui est plus que compliqué », explique l'infirmière anonyme. 

Au-delà de la complexité administrative, elle insiste sur la priorité : le bien-être des patients.

« La visite de l’infirmière est bien souvent la seule interaction sociale qu’ils vont avoir de la journée. » 

Perturber cette routine par des changements incessants de remplaçants n'est pas une solution viable pour le maintien de leur équilibre et de la qualité des soins. 

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